Accompagner la dimension émotionnelle des interactions dans la formation en travail social

Ce travail s’intéresse à la dimension émotionnelle des interactions (Peräkylä, 2012) dans les processus de formation des étudiant·e·s en travail social. Plus précisément à comment les équipes éducatives et les praticien·ne·s formateurs et formatrices (PF) accompagnent la dimension émotionnelle des interactions pendant les situations de formation pratique (stage). Dans les métiers de la relation à autrui, les émotions (Nguyen, 2020) sont fortement sollicitées au quotidien. Confronté·e·s à la complexité, la nouveauté et la diversité des situations professionnelles, les étudiant·e·s en formation pratique vivent et partagent quotidiennement leurs émotions en interaction avec les collègues et les bénéficiaires. Le sentiment de légitimité, les résonnances et l’empathie sont des thématiques récurrentes dans les discours des acteurs et actrices de la formation pratique en travail social. Les émotions sont ici considérées comme une expérience sociale et collective qui permet de penser son rapport à soi et à l’autre et de donner un sens à ses actes (Libois, 2011). Elles se construisent en interaction et participent au processus de formation. Ce travail vise à comprendre comment s’y prennent les PF et les équipes socio-éducatives pour accompagner les étudiant·e·s dans leur travail émotionnel (Hochschild, 1979/2012). Nous faisons l’hypothèse que ce travail d’accompagnement se réalise en interaction par un processus de co-construction entre les différents acteurs et actrices de la formation pratique. Comment les émotions sont rendues visibles ou non dans les interactions ? Comment les participant·e·s s’y ajustent ? Comment elles participent ou non au processus de formation ?

Sur le plan théorique, la démarche de recherche s’inscrit dans une perspective interactionnelle multimodale en analyse du travail (Filliettaz, 2018).

L’analyse de données audiovisuelles vise à rendre visible la dimension collective de l’accompagnement en formation à travers une description détaillée des interactions dans différents contextes de formation. Dans la perspective interactionnelle les émotions sont considérées dans leur processus de régulation collective. Cette régulation repose sur des indices multimodaux tels que la dimension verbale (lexique, syntaxe), les comportements (gestes, mimiques, expressions faciales, etc.), les aspects vocaux (prosodie, silence, etc.) et l’organisation séquentielle des tours de parole (Nguyen, 2020).